Rennes : comment la 4G va voyager dans le métro

Par Yann Daoulas modifié le 10/09/2020 à 11h44

La 4G se prépare à faire son entrée sur l’ensemble du métro de Rennes. Reportage sur le réseau qui sera mis à disposition des opérateurs mobiles.

Rennes : comment la 4G va voyager dans le métro

Tous les usagers du métro rennais pourront bientôt profiter du très haut débit mobile, en voiture comme en station. Pas cet été, comme annoncé l'hiver dernier, mais finalement fin septembre. Nous avions déjà évoqué la préparation de l'arrivée de la 4G dans le métro de Rennes il y a quelques mois avec les équipes de TDF, en charge du projet ; voici un deuxième volet sur le terrain en compagnie de Frédéric Saint-Lager, chef de projet national indoor chez TDF (centre), Nicolas Métayer, directeur de projet chez Huawei Technologies France (droite), et Laurent Agasse, conducteur de travaux chez Spie batignolles énergie (gauche).

Six fréquences acheminées

En attendant le lancement officiel, les représentants des trois entreprises nous ont accompagné en station afin d’aller voir de plus près le dispositif qui permettra d'apporter du réseau dans le métro de Rennes. Une infrastructure neutre par laquelle pourront transiter les signaux 3G et 4G des opérateurs mobiles, sur l’ensemble des bandes qui leur sont attribuées parmi les six suivantes : 700, 800, 900, 1 800, 2 100 et 2 600 MHz. A noter que, même dans le métro, la bande des 700 MHz, qui intéresse notamment les clients Free, ne sera activée qu’à compter du déménagement de la TNT, effectif en mars 2019 en Bretagne.

Depuis la tête de réseau située sur le site TDF de Cesson-Sévigné, les signaux des opérateurs mobiles sont d’abord multiplexés pour être acheminés sur chaque station via le réseau public FOR (Fibre optique rennaise). Ils sont ensuite démultiplexés en station pour que chaque fréquence puisse être amplifiée par un répéteur dédié. Soit au total 6 équipements, alimentés en 48 V que leur délivrent deux OPM. Enfin, les signaux sont à nouveau multiplexés pour partir vers la chaîne antennaire. Sur une (SISO) ou deux voies (MIMO, comme ici à Sainte-Anne), en fonction de la fréquentation des stations et des besoins correspondants en bande passante.

4G rennes station Sainte-Anne

Priorité aux tunnels

Des coupleurs permettent ensuite de distribuer les signaux vers les différentes antennes en station. Ce qui ne va pas sans engendrer des déperditions, et nécessite des arbitrages, en fonction de la puissance désirée en différents points du métro. Plus éloignées et requérant plus de puissance, les antennes desservant les tunnels sont ainsi priorisées. Sur les coupleurs, une sortie non affaiblie leur est réservée, tandis qu’une sortie affaiblie est allouée aux équipements plus proches, assurant la couverture des stations proprement dites, accès au métro et quais.

Les usagers du métro rennais ont peut-être déjà remarqué ces antennes panneaux (rectangulaires) et omnidirectionnelles (rondes) qui fleurissent dans les stations. Assez visibles pour l’instant, certaines feront l’objet d’interventions cosmétiques afin de les intégrer plus harmonieusement à l’environnement.

Antennes 4G métro rennes

Disposées de façons à couvrir l’intégralité des espaces fréquentés par le public, ces antennes ultra-wide band balaient l’ensemble du spectre exploitable par les opérateurs. Et peuvent aller jusqu’à 3,5 GHz, ce qui les rend compatibles avec la future norme 5G. Dont une hypothétique mise en service nécessiterait l’installation d’un répéteur sur la fréquence idoine, ainsi que « quelques ajustements logiciels » du côté de la tête de réseau, nous explique Nicolas Métayer.

Contre-la-montre nocturne

Plus difficiles à repérer dans la pénombre des tunnels, les antennes logarithmiques permettent quant à elles de couvrir l’intégralité d’un tronçon. Disposées en bout de quai de part et d’autre des sections reliant deux stations, elles suffisent à assurer une continuité de service 4G aux voyageurs. Seuls deux segments du tracé, plus longs, ont nécessité l’installation de relais dans les puits techniques.

Antenne tunnel métro RennesLa mise en place de ces antennes constituait l’une des séquences les plus délicates du chantier. Elle était en effet fortement contrainte par l’amplitude de circulation du métro, rappelle Laurent Agasse : de 5h à 1h du matin environ, ne laissant que quelques heures par nuit aux techniciens de Spie batignolles énergie pour acheminer et installer câbles et équipements. Une fenêtre d’intervention réduite nécessitant une efficacité optimale. A cet égard, nos interlocuteurs soulignent le soutien apporté par l’exploitant, Keolis, qui leur a notamment permis d’emprunter son train de travaux pour gagner un temps précieux. Illustration supplémentaire de la coopération entre une « multitude d’acteurs », du commanditaire aux sous-traitants, qui a permis de concrétiser ce projet complexe, souligne Frédéric Saint-Lager.

Cette problématique des interventions en souterrain était également l’un des arguments militant pour un réseau mutualisé entre les quatre opérateurs. Une approche qui, en réduisant le nombre d’équipements, permet de limiter les opérations de maintenance sur les parties les plus sensibles de l’infrastructure. Entre autres avantages, allant d’une occupation de l’espace optimisée à la supervision du réseau par un unique acteur, comme nous l’avait indiqué TDF il y a quelques mois.

Contretemps technique

En décembre, l’opérateur d’infrastructure annonçait pour juillet 2018 l’arrivée de la 4G dans le métro de Rennes. Mais l’activation du très haut débit mobile sur la ligne A du métro n’interviendra finalement qu'au mois de septembre. Les clients d'Orange, SFR, Bouygues et Free devraient pouvoir en bénéficier.

Pourquoi ce report ? Question de normes, nous répondent les représentants de TDF et Huawei : une partie des quelque 4 km de câbles utilisés, ceux déployés en souterrain, devait répondre à de nouvelles exigences en matière de réaction au feu. Cette récente actualisation des normes a engendré une tension sur les approvisionnements. Et, sur ce projet, deux mois de délai : de quoi reporter à début juillet le bouclage des travaux, à l'issue desquels des phases de vérification, paramétrages et tests sont encore nécessaires. Pour se connecter en 4G dans le métro, les smartphones rennais devront donc patienter quelques semaines supplémentaires.

Exposition aux ondes dans le métro : où en est-on ?

L’arrivée de la 4G sur le métro rennais pose aussi la question de l’exposition aux ondes électromagnétiques dans cet environnement confiné. A l’annonce du projet, Rennes Métropole s’était engagé sur un seuil d’exposition maximum de 1 Volt par mètre (V/m). « Nous appliquons ce que disent les normes », précise pour sa part Frédéric Saint-Lager. « Il y a des seuils spécifiques que respectent les opérateurs », et qui sont « intégrés dans les outils de simulation », de sorte qu’il est impossible de les dépasser. « La plupart du temps, on est largement en dessous des normes », affirme ainsi le représentant de TDF. Il s’agit de trouver un « compromis entre qualité de couverture et de service et exposimétrie », souligne pour sa part Nicolas Métayer. Tout en rappelant que le « dispositif mis en place ne fait que répéter ce qu’il reçoit en entrée » de la part des opérateurs », mais que l’on se situe « sur ces niveaux de champ » (de 1 V/m, ndlr).

Rennes Métropole avait indiqué que le respect de ce seuil serait vérifié par le biais de contrôles indépendants et l’installation d’un comité de suivi. Où en est le dossier aujourd’hui ? La collectivité n’a pas souhaité nous répondre. De son côté, Laurent Hamon, conseiller municipal (EELV, majorité), délégué aux usages du numérique, s’étonne du silence radio entourant la mise en place du comité de suivi, à quelques semaines seulement du coup d’envoi. Par principe peu convaincu par la pertinence d’une desserte 4G sur des trajets durant « en moyenne 10 mn », l’élu réitère aussi les réserves formulées par son groupe concernant l’enjeu sanitaire. S’il salue l’introduction du seuil de 1 V/m, il souhaite que soit pris en compte le principe Alara (aussi bas que raisonnablement possible) inscrit dans la loi Abeille. Et réclame une vigilance particulière sur les problèmes d’électro-compatibilité, notamment avec les dispositifs médicaux, susceptibles d’apparaître « dès 3 V/m ». Enfin, il préconise d’associer au protocole de mesures les experts indépendants du CRIIREM, dans le cadre d’une approche dépassant le simple contrôle pour aller vers la « gestion des risques ». A suivre…

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