David El Fassy (Altitude Infrastructure) : « Sur les RIP, tous les FAI nationaux veulent aller très vite »

Par Yann Daoulas modifié le 10/09/2020 à 12h11

Déploiement de la fibre, arrivée des OCEN sur les RIP, AMEL... Le point avec David El Fassy, PDG d'Altitude Infrastructure

Daivd EL Fassy Interview

Fort de 3 millions de prises contractualisées sur les réseaux d’initiative publique, Altitude Infrastructure entend faire valoir sa place de « 1er opérateur alternatif sur les RIP », derrière Orange, et juste devant Axione. Des ambitions qui commencent à se traduire aussi sur les déploiements : au 2e trimestre, selon les données de l'Arcep, Altitude était ainsi le 2e pourvoyeur de nouvelles lignes raccordables sur les RIP (+56 000), derrière Axione, pour un total de 156 000 à fin juin.

A comparer avec l’objectif affiché par l’entreprise dans ses dernières projections : 355 000 prises commercialisanles à la fin de l'année, ce qui suppose un doublement de cadence au 2e semestre. Accélération il y aura, nous confirme David El Fassy, PDG D’Altitude, tout en précisant que l’objectif se situe plutôt entre 300 000 et 350 000 prises commercialisables à fin 2018. Un premier jalon sur une trajectoire qui doit le porter à 2,4 millions à fin 2022.

Déploiement FttH altitude Infrastructure

Déploiements FttH Altitude : Rosace carbure

Il reste encore du chemin à parcourir, donc, et Altitude compte sur certains territoires pour ouvrir la voie : l’Alsace, notamment, et son réseau Rosace, principal pourvoyeur de prises actuellement, ainsi que la Manche, l’Eure et le Doubs. En attendant les RIP de l'Aude, des Pyrénées-Orientales et de la Haute-Garonne, qui « commenceront à sortir des prises l’an prochain », le compteur recevra l’appoint du réseau Losange, le voisin de Rosace, qui vient tout juste de commercialiser ses premiers accès fibre dans le Grand-Est. Et aussi de la zone PACA, où les premières lignes commencent à sortir de terres sur les RIP alpins.

Choisi pour exploiter les réseaux publics de quatre départements (04, 05, 06, 13), Altitude n’empochera pas le dernier contrat de la région, le Var ayant préféré Orange pour déployer et exploiter son RIP dans le cadre d’une DSP. Une procédure contestée en cours de route par Altitude. « Au mois de juillet, nous avons fait un recours précontractuel car on estimait que les choses ne se passaient comme on le voulait », explique David El Fassy. « Depuis, cela a été jugé, nous avons perdu le recours », poursuit le patron du groupe, qui serait bien vu décrocher le 83 pour constituer « un bel ensemble ».

AMEL : une « hérésie » sur les RIP engagés

En attendant la possibilité de postuler sur les phases 2 ou 3 des RIP, se sont ouvertes cette année de nouvelles opportunités avec l’émergence des Appels à manifestation d’engagements locaux. Un dispositif de transition loin de faire le poids face aux réseaux d'initiative publique, estime David El Fassy : « Dans un RIP, la collectivité a le cadre réglementaire, les moyens coercitifs de tenir son délégataire, et elle a la propriété de l’actif à la sortie ».

Des réserves qui n’ont pas empêché l'opérateur de saisir l’AMEL au bond : il a ainsi répondu à « pas mal d’appels, y compris sur des territoires où nous n’étions pas présents, mais jamais loin d’une de nos bases ». Il a également répondu à l'appel - infructueux - lancé par Mégalis en Bretagne, sur un périmètre plus conséquent (600 000 prises), qui serait alors devenue « une base à part entière ».

Le dispositif peut se défendre « dans le cadre d’une discussion avec le délégant pour réaménager un contrat et rediscuter le meilleur équilibre économique pour tout le monde ». En revanche, insiste le patron d'Altitude, « vouloir faire des AMEL à des endroits où les RIP ont déjà démarré » constitue rien moins qu’une « hérésie ».

Respect des délais déploiement : Altitude serein

S’agissant, justement, des RIP déjà engagés, face à des collectivités plus que vigilantes sur la question des délais, l’opérateur se veut rassurant. « Partout où il y a des concessions, ce n’est pas une catastrophe à date. Il y aura peut-être quelques décalages de chantier mais rien de bien méchant », explique le patron d’Altitude.

Sur les deux principaux facteurs de ralentissement apparus ces derniers mois, notamment, l'entreprise affiche sa sérénité. Concernant les approvisionnements en fibre, le plus dur est passé, estime ainsi David El Fassy, le sourcing à l’international ayant permis de surmonter la saturation des câbliers français. En attendant un hypothétique assouplissement des normes du côté du régulateur : « la G657A2, cela fait sens pour faire de la colonne montante, mais pour faire du transport et de la longue distance, il y a d’autres normes, comme la G6572D, utilisée partout dans le monde, avec beaucoup plus de capacités disponibles ».

Quid des tensions sur le recrutement ? Altitude affirme n’avoir « pas de problème à trouver de la main d’œuvre pour déployer les réseaux ». En revanche, « là où il y a un vrai goulot d’étranglement, c’est sur la partie bureaux d’études », à un moment où « tous les projets des collectivités partent en même temps ». Pour limiter l’impact de cet aléa, Altitude « saucissonne ». Exemple en Alsace, un RIP de 380 000 prises adossées à 47 nœuds de raccordement optiques (NRO). « Nous avons divisé cela en 47 chantiers, 47 équipes, et 47 contrats de sous-traitance », explique David El Fassy. « Bon an mal an, si un chantier fonctionne un peu moins bien et un autre un peu mieux, vous vous en sortez. En revanche, si vous mettez tous vos œufs dans le même panier sur un seul gros chantier, c’est plus risqué ».

Commercialisation : Bouygues en pointe, Free « à fond »

Réseaux THD Altitude InfrastructureSur le plan commercial, les choses bougent aussi chez Altitude. Si de nombreux FAI de proximité proposent leurs offres de longue date sur les réseaux de l’opérateur, les OCEN accélèrent enfin la cadence pour leur emboîter le pas. Deux accords-cadres ont été signés avec des opérateurs nationaux. Le premier, passé avec Bouygues, se concrétise depuis plusieurs mois sur le terrain, en particulier en Alsace. Et le FAI a déjà passé « la plupart de ses commandes d’hébergement », précise David El Fassy.

Free, qui a également conclu un deal national avec Altitude, « est dans la même dynamique », avec une arrivée annoncée pour la fin d’année sur Rosace. A l’heure où les délais d’arrivée de la marque d’Iliad sur les RIP interrogent – l’attente fut longue sur le réseau du Nord-Pas-de-Calais exploité par Axione – le patron d’Altitude tient à souligner l’implication des équipes de Free : « Ce n’est pas de la demi-mesure, ils sont vraiment à fond. Les équipes techniques étaient mobilisées dès la signature du contrat ».

Tous les OCEN « veulent aller très vite » sur les RIP

Avec SFR, Altitude annonçait le mois dernier un accord « en cours de finalisation », et dont le bouclage n’était qu’une question de mois, voire de semaines. A la clé, là aussi, une arrivée de l’opérateur au carré rouge sur tous les RIP Altitude à terme. « Y compris le Grand-Est », nous confirme David El Fassy. Un territoire dont, l'an dernier, la filiale d’Altice avait très mal vécu son éviction au profit du groupement Altitude-NGE, au point de menacer d’y déployer son propre réseau parallèle. Avant d’aller jusqu’à promettre de « fibrer la France »...

Depuis, l’opérateur au carré rouge a revu ses plans. Et s’active, comme ses concurrents, pour se positionner sur les RIP. « Un cap a été passé, et tous veulent aller très vite désormais », souligne David El Fassy, selon qui tous nourrissent aujourd’hui l’ambition d’être « le premier opérateur de détail qui deviendra la locomotive sur les RIP ».

Une bonne nouvelle pour Altitude, en passe d’atteindre un premier objectif : « Dans tous les business plans que nous avions présentés à nos financeurs, nous avions dit que nous aurions les OCEN sur nos RIP en 2019 ». Après SFR, ne restera plus donc qu’à signer Orange, avec qui des « échanges en vue d’établir un accord national sont en cours ». Le patron d’Altitude rappelle d’ailleurs qu’Orange et SFR sont déjà présents sur certains de ses RIP, à Saint-Lô et Cherbourg, par exemple. Si bien que « nous avons passé toutes les fourches caudines d’industrialisation, d’interfaçage des systèmes d'information, de mise en œuvre des process », insiste-t-il. A présent, leur arrivée « n’est plus un problème technique ou contractuel, mais davantage une question de stratégie ».

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